Charlie flânait depuis plusieurs heures dans le supermarché. Il n'était vraiment pas habitué à traîner dans des endroits pareils, c'était immense, sans fenêtre, avec des tonnes de nouriture de toute sorte exposées sur des étagères métalliques. Il voyait tout le monde se trimballer avec un caddie et se demandait bien où est ce qu'ils l'avaient trouvé ! Fallait-il faire partie d'une secte pour avoir le confort de faire ses courses avec un contenant à roulette ? Avec son petit sachet en papier il n'allait pas faire long feu. "Puta*n..." Y'a trop de marques. Beaucoup trop de marques. Des boites de céréales de sorte aussi variée que nombreuse. Sérieux il était sensé choisir sur quel critère ? La plus jolie, la plus colorée, la mieux dessinée ? Il devait regarder le prix ou prendre en fonction de la qualité ?
Tout en haut du rayon, un carton attira son attention. Sur ces céréales, il y avait en image des abeilles aux yeux immenses et brillants, au nom plutôt représentatif, "Mielpops". Attiré comme une mouche sur de la merde, il s'est avancé vers son précieux en regardant en l'air et en tendant le bras jusqu'à être confronté à un obstacle. Le choc fu assez violent et l'obstacle en question fu également arrêté dans sa progression. Charlie tomba violemment; laissa échapper un juron, totalement pris au dépourvu par la collision. Il se massa la tête en bougonnant. Son regard s'arrêta sur la "responsable" de sa chute. Elle avait des cheveux noirs qui contrastaient avec sa peau extrêmement pâle. Son petit visage, ses grand yeux expressifs, elle lui rappelait quelqu'un.
-Mais t'es connue toi ! J't'ai pas vu à la télé ? Kim Kardashian c'est ça ?

«J'aurais mieux fait de faire mes course en ligne... » Soupirais-je en posant un paquet de filtre à café dans mon chariot avant de le pousser vers le rayon suivant. Je pressais le pas, survolant rapidement les gondoles à la recherche des articles de ma liste. Pourtant je n'avais vraiment rien de mieux à faire que de faire mes courses. J'avais une petite performance prévu ce soir dans un bar en centre ville, mais le reste de ma journée était totalement libre. J'aurais donc pu prendre mon temps, passer ma journée dans cet immense entrepôt où les gens se bousculaient pour faire des affaires au rayon poissonnerie, j'aurais pu lire la composition de chaque produit que je posais dans mon chariot, faire la conversation au chinois qui se fait passer pour un japonais et fais des sushi au rayon frais.... Mais non. Ça faisait un moment que je traînais dans ce supermarché et je commençais sérieusement à prendre les abeilles. Il y avait trop de monde, trop de bruit, trop de choix... bref trop de tout. Je préférais mille fois le hurlement de million de fans entassés dans une salle de concert, ou les cris et les flash des paparazzis, plutôt que le froid du rayon surgelé, la blancheur de la lumière des néons et les pleures des bébés coincés dans les sièges en plastiques des chariots de leurs mères.
Arrivé aux rayon des céréale je laissais mon cadi en tête de gondole. C'était le dernier article dont j'avais besoin. Une fois mes Lucky Charms récupérées et je pourrais courir à la caisse. D'un pas rapide je m’avançais donc vers le précieux paquet rouge. Malheureusement je n’eus pas le temps de saisir l'article qu'un inconnu me rentra dedans. Le choque fut suffisamment violent pour nous faire tomber tout les deux. Je restais étrangement silencieuse alors que l'homme qui m'était rentré dedans commençait déjà à rouspéter. Ne voulant pas d’ennuis (pour une fois) et voulant simplement prendre mes céréales et rentrer chez moi, je m’apprêtais à m'excuser lorsque la voix de l'inconnu m'en retira l'envie. « Kim Kardashian... ?» Répétais-je ne pouvant cacher ma stupéfaction. Il me prenait pour Kim ? Cette bimbo, sans talent qui n'était connue que pour faire partie d'une famille de milliardaire ? « Sérieusement ? »  Ajoutais-je plus amèrement que je ne l'aurais voulu. Je me redressais laborieusement, échappant un soupire d'agacement. Une fois debout je frottais machinalement ma jupe en observant l'inconnu de haute en bas. Il était maigrichon et avait la peau d'un rouquin, il avait l'air, d'apparence, inoffensif, pourtant il venait d'obtenir une place dans ma liste noir. « La prochaine fois regarde où tu vas ! » Lui lâchais-je froidement.

La brunette, elle était pas commode. Comme quoi ça confirmait ce qu'il pensait. Les gens connus sont plutôt chiants. C'est vrai quoi, le succès leur monte à la tête, les strass, les paillettes, la gloire et l'argent, ils finissent par se sentir bien supérieurs aux petites gens dans le genre de Charlie. En réalité il en avait eu des mauvaises expériences, surtout avec les citadins... bouseux, tu couche avec ta mère, t'es un illettré, retourne traire tes vaches, et la liste est longue. Peut être vivait-il simplement, mais dignement. Avec son ton hautain et son air renfrogné elle lui avait pourri son après midi et avait réussi à l'agacer au plus haut point !
-Elle va s'calmer la starlette et profiter d'avoir heurté le sol une première fois pour y retourner à genoux et me demander des excuses !
On commençait à s'arrêter de plus en plus fréquemment dans le rayon petit déjeuner pour entrevoir la dispute, encore à l'état d'embryon même si on sentait déjà la tension monter d'un cran.
-Je n'expose peut être pas mon magnifique fessier dans les magazines mais j'ai l'droit à un peu de respect moi aussi ! Sérieux on vit dans quel monde ?
Il fronça les sourcils parce que même si il n'était pas réellement en colère il était quand même sacrément emmerdé par l'histoire de la jolie miss qui pétait plus haut que son cul.  
-Donc ça y est t'as été reconnue alors que t'achetais du chocolat et des serviettes hygiènique et ça fait une scène ? Déjà ça t'as pas suffit de foutre le bordel en rentrant en collision avec moi il faut en plus que tu prennes tes petits airs.

C'était le monde à l'envers. Le mec me rentrait dedans et c'était de ma faute?! Je levais les yeux au ciel en l'entendant me conseiller de me remettre à genoux pour lui demander des excuses. « Tu peux toujours rêver. » Dis-je sèchement. Je sentais la colère monter alors qu'il en rajoutait, toujours assit par terre, émettant l'hypothèse selon laquelle je montrais mes fesses dans les magazines pour me faire respecter. Bordel mais je ne suis pas Kim Kardashian, je ne pose pas à moitié nue moi ! … Enfin je l'ai eu fait, mais j'avais un short ! Bref, là n'était pas la question ce rouquin, qui n'était pas roux, commençait vraiment à m'agacer. « C'est toi qui fais un scène ! » Rétorquais-je. Pour une fois que je n'avais rien demandé à personne et que je faisais simplement mes courses, voilà qu'un inconnu m'agressait après m'être rentré dedans. Les passants commençaient petit à petit à s'arrêter pour assister à la scène. A croire qu'il n'avait jamais vu personne se disputer avant. J'échappais un soupire agacée : « Circulez y'a rien à voir ! » Lâchais-je accompagné d'un geste de la main, aux crétins qui se tenaient au bout du rayon, les yeux écarquillés. Dès qu'il se passait quelques choses dans cette ville, les gens accouraient comme des mouches sur une merde bien fraîche ! « Tu me rentres dedans, et sans me laisser le temps de m'excuser tu me manques de respect. Et tu t'attendais à ce que je sois sympa peut-être ? » Dis-je enfin en m'adressant de nouveau à l'inconnu. « Et oui, j'étais sur le point de m'excuser. » Ajoutais-je froidement avant qu'il ne dise quoi que ce soit. « Je n'suis pas un monstre, t'as beau être clairement  mal dans ta peau, je n'allais pas te cracher à la gueule sous prétexte que tu ne regardais pas où tu allais. » Poursuivais-je en attrapant mon paquet de céréale.

« Garder son calme, ne pas le frapper, garder son calme... » pensais-je pendant que le jeune homme me répondait, de plus en plus énervé. Alors qu'il était sur le point de me vanner sur le fait que j'étais j'allais m'excuser, une pluie de céréales nous tomba dessus. Les réservoirs de céréales bios qui étaient à quelques mètres de nous, venaient de cédé, déversant des kilos de céréales sur nous et sur le sol du magasin. Parce que sous prétexte que c'était bio il fallait les ranger dans des conteneurs en plastiques où les clients pouvaient venir se servir librement (concept de merde). C'était n'importe quoi, vraiment. Un bon vieux paquet en carton était tellement plus pratique. Bref, cette pluie de céréale me fit presque soupiré. A croire que le destin s'acharnait sur nous. Je fermais les yeux, mettant mes mains au dessus de ma tête attendant que l'orage ne passe avant de les rouvrir et de retirer les céréales coincés dans mes mèches noirs. C'est à ce moment qu'un employé du magasin nous apporta deux balais. Je n'en revenais pas. Les réservoirs se vidaient sur nous et c'était à nous de nettoyer ? C'était le monde à l’envers ! Le magasin devait plutôt s'excuser pour le dérangement et prier pour qu'on ne les traînent pas en justice pour avoir tenter de nous tuer avec des céréales ! L'inconnu sembla tout aussi indigné que moi puisqu'il protesta immédiatement, en profitant pour me lancer un petit pique bien mérité... J'étais sur le point de renchérir et de menacer à mon tour l’employé, mais malheureusement il menaça d’appeler la police pour expulser le jeune homme, avant de partir. J'échappais un long soupire et voyant que mon ennemi juré c'était plié aux ordres, j'attrapais, à mon tour, mon balais presque par dépit pour l'aider à nettoyer. On était dans cette merde ensemble après tout... puis ça permettait de calmer un peu le jeu.
Un court silence s'installa alors que, chacun de notre coté, l'on balayait ces foutus céréales. Puis d'un coup il s'arrêta et je sentis son regard posé sur moi. « Tu trouves pas que c'est gâcher de la nourriture ? » Je m'arrêtais à mon tour de balayer, posant mes yeux bleu sur lui. « C'est gâché c'est sûr. Surtout que vu que c'est des céréales bio on pourrait nourrir des animaux avec. » Dis-je simplement avant de me remettre à balayer lentement le sol. Si ça avait été des chocapic encore ça aurait été vraiment gâché. Mais là c'était du bio, on pouvait en faire d'autre chose, ce n'était pas perdu ! Pourtant ça allait très certainement finir à la poubelle... Vive la grand distribution ! Le jeune homme n'avait pas l'air d'être un mauvais garçon après tout, on pouvait bien discuter d'agriculture bio ensemble. Il avait ce look de mec un peu marginal, adepte du bio, ami des animaux, qui vie dans sa campagne et qui ne vient en ville que quand il n'a pas d'autre choix. Il m'avoua trouver le bouffe industrielle dégoûtante et cette remarque ne fit que renforcer cette idée que j'avais de lui. « J'aime bien la bouffe industrielle perso. Si chacun devait planter ses légumes, ou tuer ses poulets, je pense que beaucoup mourraient rapidement de faim. » Ajoutais-je dans un rictus. L'industrialisation n'avait pas que du mauvais après tout. C'est vrai que ça poussait à la surconsommation, que sa polluait etc. Mais en même temps : ça nous offrait un grand choix de produit, et ça permettait de nourrir le plus grand nombre. Je savais que, personnellement, je serais l'une des première à mourir de faim sans un supermarché à proximité. Je n'avait pas du tout la main verte. J'avais déjà réussie à faire crever un cactus...

« C'est gâché c'est sûr. Surtout que vu que c'est des céréales bio on pourrait nourrir des animaux avec. » Pour une fois ils étaient d'accord sur quelque chose. Il releva son regard vert vers celui, bleu très pâle, de la jeune femme certainement pas nommée Kim. Il se remit à balayer, prenant soin de mettre chaque flocon jusqu'au dernier dans le sac poubelle tout neuf qu'on leur avait sortit. Se faire esclavager comme ça par une bande de zombie sans cervelle ! Rien qu'à l'idée de devoir rester enfermé toute la journée dans une prison fluorescente à passer des produits sous une machine au bip bip infernal, voir la moue défaite des clients, voir l'argent cliqueter à mesure qu'il entre dans la caisse automatique, voir ce milieu hostile, se dire avec amertume qu'on ne poursuit aucun autre but... Cette simple vision d'horreur suffit à faire frissonner Charlie qui n'avait qu'une envie, se tirer le plus vite possible. « J'aime bien la bouffe industrielle perso. Si chacun devait planter ses légumes, ou tuer ses poulets, je pense que beaucoup mourraient rapidement de faim. », il fronça les sourcils. C'est vrai qu'aujourd'hui la plupart des gens étaient des citadins, et en particulier les stars planétaire. Il referma le sac en plastique avec un noeud et le souleva.

-T'as bien raison. Je vais ramener ça à mon ranch, ça devrait nourir quelques lapins. Planter des légumes... c'est à la portée de tous, même des cons. C'est pas plus difficile que de taper sur un clavier d'ordinateur ou entrer un numéro de carte bleue.

Il scruta les environs et constata que le sale type qui les forçait à nettoyer était retourné dans son petit bureau isolé. Charlie décida d'en profiter.

-Bon tu viens avec moi ? C'est à... à peine quelques kilomètres de la ville. Il y a des chevaux, des abeilles, de l'herbe, et ce genre de chose toute bête et indispensables qu'on ne retrouve pas ici. Ou si tu veux je te dépose, peut être qu'avec ce sac de céréales bio t'aimerais nourir tes gamins. Si les stars en ont, des gosses. Quoi que ça leur arrive mais d'autres s'en occupe à leur place, ajouta-t-il avec un sourire éclatant.

Pour une fois, on était d'accord sur quelques choses. J'esquissais un sourire en balayant les céréales, alors qu'il expliquait qu'il allait ramener ça, à son ranch, pour nourrir des lapins. « Un ranch... ? » pensais-je en le regardant de haute en bas. Maintenant qu'il le disait ça me semblait évidant. J'étais persuadé qu'il était agriculteur, ou quelque chose dans ce goût là, mais je dois avouer que je ne m'attendais pas à ce qu'il ai un ranch ! C'était beaucoup plus classe !  « Planter, je sais faire, garder en vie c'est autre chose ! »  Admettais-je dans un petit rire nerveux. Puis l'inconnu observa les alentours et machinalement je l'imitais, remarquant rapidement que l'enfoiré d'employer qui nous avait demander de balayer était parti. Le rouquin me proposa de partir avec lui dans son ranch et étrangement l'idée me plaisais bien. Puis évidemment, comme s'il ne pouvait pas s'en empêcher, me proposa de me déposer pour que je puis donner ces céréales à mes enfants.  « J'ai pas d'enfants... »  Dis-je en fronçant les sourcils.  « Et si j'en avais je m'en occuperais moi même !»  Ajoutais-je faisant mine de le menacer avec mon balais.  « T'es plein de préjuger en faite... c'est fou ! » râlais-je encore avant de pousser les céréales restantes dans le sac poubelle et de poser mon balais dans un coin.  « Attrape ça, on va aller nourrir tes lapins. » Dis-je en pointant du doigt le gros sac noir rempli de graine. Je n'avais de toute façon rien de mieux à faire et puis, après ce qui c'était passé, je n'avais aucunement envie de payer quoi que ce soit provenant de ce magasin, donc abandonner mon chariot ici ne me dérangeais pas.